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Constitutionnaliste: la Question jurassienne pas forcément close

La Question jurassienne n'est pas forcément close, selon l'ancien président de la Cour constitutionnelle jurassienne Jean Moritz. © KEYSTONE/JEAN-CHRISTOPHE BOTT
La Question jurassienne n'est pas forcément close, selon l'ancien président de la Cour constitutionnelle jurassienne Jean Moritz. © KEYSTONE/JEAN-CHRISTOPHE BOTT


Publié le 22.06.2024


"La Question jurassienne ne disparaîtra pas par le simple miracle des mots", a déclaré le constitutionnaliste Jean Moritz samedi à Delémont lors d'une conférence à la Fête du peuple jurassien. La situation n'est pas figée du point de vue de la loi, a-t-il affirmé.

Ancien juge cantonal et ex-président de la Cour constitutionnelle jurassienne, Jean Moritz a fait l'exégèse de la Constitution fédérale pour savoir si une porte restait ouverte en vue d'une éventuelle nouvelle évolution dans le Jura bernois, lors d'un exposé à la Conférence internationale sur le droit d'autodétermination au Parlement jurassien.

Les responsables politiques, bernois en particulier, assurent que le transfert de Moutier (BE) dans le Jura au 1er janvier 2026 - sous réserve de l'aval populaire des deux cantons cet automne - marquera la fin du conflit jurassien, a rappelé M. Moritz. Or, "il s'agit ici d'une rhétorique. Nul ne peut décréter, d'un point de vue politico-légal, la fin de la Question jurassienne", a soutenu le spécialiste.

L'article 53 de la Constitution fédérale décrit les modalités de la modification d'un territoire cantonal. Ce faisant, la Constitution "se borne-t-elle à décrire un processus (d’autodétermination) ou admet-elle implicitement un droit à l'autodétermination?", s'est demandé M. Moritz. A ses yeux, la cohérence implique de reconnaître ce droit implicite. De quoi ouvrir la porte à de nouvelles revendications.

Identité propre

"Le Jura ne se réduit pas au canton du Jura. La Constitution bernoise elle-même reconnaît l'identité du Jura bernois", a précisé l'ancien juge.

Si le droit à l'autodétermination est reconnu, les communes intéressées peuvent toujours l'invoquer, "contrairement à ce qu'affirme le gouvernement bernois", a dit M. Moritz. Celle de Belprahon (BE) en particulier a manifesté des velléités de rejoindre le Jura, à l'instar de Moutier, sa grande voisine.

Evoquant plusieurs scénarios possibles, Jean Moritz a estimé que la question de la création d'un canton de l'Arc jurassien (Jura, Jura bernois, Neuchâtel) "pourrait revenir sur le tapis".

Autonomie renforcée

Il pense aussi, par ailleurs, que la création d'un statut d'autonomie renforcée pour le Jura bernois constitue "une perspective à moyen terme réaliste". Une gouvernance régionale y serait établie, débouchant sur une collaboration étroite avec le Jura dans des domaines comme le tourisme, les transports, l'école ou la culture.

En revanche, le scénario d'un transfert du Jura bernois dans le canton du Jura reste "une vue de l'esprit", a relevé l'ancien juge.

Ce dernier a ironisé au passage sur la nouvelle dénomination de "Grand Chasseral", qui tend à effacer la réalité politique de la région, et a lancé: "Il n'est pas exclu que le conflit jurassien perdure et pas exclu non plus que le dialogue entre le Jura et Berne se normalise".

La Conférence internationale sur le droit d'autodétermination réunissait, outre des militants jurassiens, des représentants des communautés francophones en Acadie (Canada), de la Vallée d'Aoste (Italie) et du Québec, soutenus par d'autres "peuples amis" en Corse, en Catalogne ou en Belgique.

ats

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